Quel délai pour introduire une demande d’effacement de la dette en cas de faillite personnelle ?

Quel délai pour introduire une demande d’effacement de la dette en cas de faillite personnelle ?

Publié le : 29/04/2021 29 avril avr. 04 2021

Le Code droit économique prévoit que pour pouvoir bénéficier de l’effacement de ses dettes, le failli doit en faire la demande dans les 3 mois de la publication du jugement de la faillite.
A défaut de l’avoir fait dans ce délai, l'effacement lui est refusé et le failli est tenu de rembourser le solde de ses dettes.
Dans une décision du 22 avril 2021, la Cour constitutionnelle a décidé que cette disposition était inconstitutionnelle !

Qu’est-ce que cela entraîne ?

La Cour Constitutionnelle vient donc de trancher : l’article XX.173, § 2, du Code de droit économique est inconstitutionnel en ce qu’il viole le principe d’égalité et de non-discrimination.

Celle-ci, par son arrêt 62/2021 rendu ce jeudi 22 avril 2021 (https://www.const-court.be/public/f/2021/2021-062f.pdf) a éclairci une question qui faisait couler beaucoup d’encre. 

Le Tribunal de l’entreprise d’Anvers avait originairement posé une question préjudicielle à la Cour dès lors que l’article 173 § 2 du Livre XX du Code de droit économique impose au failli d’introduire sa requête en effacement dans les 3 mois de la publication du jugement déclaratif de faillite.

Le non-respect de ce délai oblige irrévocablement le failli à continuer de supporter sur l’ensemble de son patrimoine les dettes qui n’ont pas été liquidées par le curateur. A contrario, le failli qui a introduit sa requête dans le respect du délai est pratiquement assuré que le solde de ses dettes sera effacé. Le tribunal s’est dès lors interrogé sur la compatibilité de ce délai de forclusion au principe d’égalité et de non-discrimination.

Rappelons le souhait du législateur de remplacer le système d’excusabilité par celui de l’effacement du solde des dettes dans un but de promotion de l’entrepreneuriat de la seconde chance et de la quasi-automaticité de l’effacement, en précisant, entre autres, dans les travaux préparatoires que dans 95 % à 99 % des cas, l’effacement est accordé 1 .

La Cour constate dans son arrêt que le juge interprète l’article XX. 173, §2 Code de droit économique comme un délai de forclusion, c’est-à-dire qu’il fait perdre définitivement au failli son droit d’introduire une requête en effacement de ses dettes à l’expiration de ce délai de 3 mois.

Mais la Cour estime que le droit d’accès à un tribunal est violé lorsqu’une formalité ne sert pas la sécurité juridique et la bonne administration de la justice, mais qu’elle constitue une barrière qui empêche le justiciable d’utiliser les voies de recours disponibles.
 
En l’occurrence, le délai de forclusion ne saurait être considéré comme une mesure pertinente en vue du règlement rapide de la faillite.

En outre le dépassement de ce délai de forclusion entraîne des effets totalement disproportionnés pour le failli personne physique, et sa/son (ex)-partenaire, qui perd toute possibilité qu’un juge se prononce sur l’effacement du solde de ses dettes et qui doit irrévocablement continuer à supporter sur l’ensemble de son patrimoine les dettes qui n’ont pas été réglées lors de la liquidation de la masse.

Cette décision est accueillie avec satisfaction dès lors qu’elle constitue une première étape vers l’annulation de l’article XX. 173, §2 jugé discriminant, ouvrant ainsi la voie à un recours en annulation.

La quasi-automaticité de l’effacement des dettes du failli pourrait bientôt devenir réalité et ne plus être un leurre. Toutefois, gardez en tête qu’il existera toujours un risque qu’une demande d’effacement fasse l’objet d’une opposition totale ou partielle du curateur, de ministère public ou d’un tiers intéressé.

En conclusion, nous vous recommandons de consulter un avocat avant l’aveu de faillite ou rapidement après une citation en faillite afin d’éviter les lourdes conséquences qu’engendrerait le refus d’effacement du solde des dettes du failli.
 
Jean-Noël BASTENIERE en collaboration avec Pauline de Seze et Hugo Christiaens Langlet
Vous voulez en savoir plus à ce sujet ? Contactez nos experts au 02 357 28 37

 
1 Projet de loi portant insertion du Livre XX « Insolvabilité des entreprises », dans le Code de droit économique, et portant insertion des définitions propres au livre XX, et des dispositions d’application au livre XX, dans le Livre I du Code de droit économique, Rapport de première lecture, Doc.parl., Ch. repr., 2016-2017, doc. n°54-2407/004, p. 120.

 

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