Droit du travail : des choses changent au 28 octobre 2023 !

Droit du travail : des choses changent au 28 octobre 2023 !

Publié le : 12/09/2023 12 septembre sept. 09 2023

La loi du 20 mars 2023 modifiant la loi du 26 décembre 2013 introduisant le statut unique entre ouvriers et employés et fixant des nouvelles règles pour déterminer les délais de préavis en cas de licenciement ou de démission, est passée relativement inaperçue.

Or, elle a été publiée au Moniteur belge le 28 avril 2023 et, conformément à son article 6, entre en vigueur six mois plus tard, soit le 28 octobre 2023 – c’est presque demain…

En deux mots, la loi supprime dans son cadre la distinction faite entre employés supérieurs et inférieurs, donnant lieu à des règles d’application différentes, distinction jugée comme contraire au principe d’égalité et de non-discrimination par la Cour constitutionnelle. Ceci rejaillit tant sur les règles de démission que sur celles du licenciement.

Rappelons qu’actuellement, le délai de préavis à respecter en cas de licenciement ou de démission de travailleurs dont le contrat de travail a pris cours avant le 1er janvier 2014, est constitué en additionnant deux délais calculés, le premier, en mois et en fonction de l'ancienneté de service ininterrompue acquise au 31 décembre 2013 (partie 1) et le second, en semaines et en fonction de l'ancienneté de service ininterrompue acquise à partir du 1er janvier 2014 (partie 2).

Qu’est-ce qui change ?

La démission, d’abord. 

Pour faire court, l’article 3, §2 de la loi du 26 décembre 2013 (inséré à l’article 37/2, §2 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail) fixe en principe à un maximum de 13 semaines le délai de préavis de celui qui démissionne. 

Toutefois, pour la période antérieure au 1er janvier 2014, l’articles 68 de cette même loi prévoit des règles spécifiques selon que l’employé est inférieur (en-dessous d’un plafond de rémunération annuelle) ou supérieur (le contraire). Ainsi, pour cette période, un employé supérieur pourrait avoir à donner jusqu’à 4,5 ou 6 mois de préavis (selon ses revenus) en cas de démission, par tranches de 1,5 mois par 5 ans d’ancienneté, là où un employé « inférieur » sera limité à 3 mois. Rien qu’à ce titre, les 13 semaines seraient largement dépassées – par exemple, un employé supérieur engagé en 2002 devrait donner 4,5 mois de préavis.

Ce qui a fait écrire au législateur à l’article 69, alinéa 3 de la loi du 26 décembre 2013, que dans ce cas, cet employé est dispensé de passer à la « partie 2 » du calcul du délai – évidemment, puisqu’il excède déjà (ou atteint) le plafond de principe … Le surréalisme à la belge ! En revanche, si le premier délai est inférieur aux 13 semaines, on passe au second calcul, en limitant le tout à 13 semaines.

Tout cela est compliqué, et provoque questionnements et imprécisions.

Bref, simplification bienvenue, en supprimant les mots « ou de démission » dans l’article 67 de la loi du 26 décembre 2013, et en abrogeant les articles 68, alinéa 4 et 69, alinéa 3 de cette même loi, il n’y a plus de question à se poser : on ne s’occupe plus de période pré- ou post- 2014 ni de la catégorie du travailleur, et pour tous ceux qui ont 8 ans ou plus d’ancienneté, le préavis en cas de démission sera au maximum de 13 semaines. La seule référence est celle des nouveaux délais de préavis indiqués à l'article 37, §2 de la loi sur les contrats de travail précitée.

Le licenciement, ensuite.

La loi nouvelle abroge aussi l’article 68, alinéa 3 de la loi du 26 décembre 2013. Le texte actuel prévoit en effet que pour l'employé supérieur, le calcul de la « partie 1 » est égal à un mois par période d'ancienneté entamée avec un minimum de trois mois. Pour les autres, ce même calcul est établi sur la base des règles en vigueur au 31 décembre 2013, soit trois mois par période entamée de cinq ans d'ancienneté. 

On annonce cependant déjà une loi correctrice, car selon certaines sources, cette abrogation pure et simple ne serait pas intentionnelle. En effet, elle pourrait réintroduire des discussions sur un délai de préavis raisonnable pour les employés supérieurs avec l’employeur et faire de la grille Claeys un phénix, étant entendu qu’à défaut d’accord, la durée fixée par le juge ne puisse être inférieure à 3 mois par 5 ans d’ancienneté.  A moins qu’il annule cette abrogation, et en revienne à la règle actuelle.

Affaire à suivre …

Disposition transitoire, enfin.

La loi nouvelle ne vaut que pour l’avenir : aux termes de son article 5, les préavis notifiés avant son entrée en vigueur – le 28 octobre 2023, rappelons-le – continuent à sortir tous leurs effets.


Eric Boigelot, avocat-associé

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